24 mars 1984 : Notre Dame de Fatima rend visite à Jean Paul II.

Manuel GONZÁLEZ OLAECHEA Y FRANCO (2004), statue de Notre Dame de Fatima, Wikipédia : Creative Commons.

Ce jour-là, Jean Paul II reçoit au Vatican une surprenante visite : celle de Notre Dame de Fatima. La statue a fait le voyage dans un avion spécialement affrété depuis le Portugal. Elle est accueillie, comme un chef d’État, par un aréopage de cardinaux et dignitaires religieux. Puis la statue est exposée au Vatican en divers endroits et, durant la nuit, dans la chapelle privée du pape.

Pour comprendre cet intermède baroque du pontificat de Jean Paul II, il faut revenir en arrière au moment de l’attentat du 13 mai 1981 lorsque Mehmet Ali Agça tente de tuer le pape d’un tir de revolver. Passé proche de la mort, Jean Paul II prit conscience rétrospectivement que c’était le jour où on fêtait l’apparition de la Vierge Marie en 1917 à trois bergers au Portugal. Il ne douta plus lors de la grâce spéciale qu’il avait reçue : « C’est une main maternelle qui guida la trajectoire de la balle et le pape agonisant s’arrêta au seuil de la mort ». Cette épisode ne fit que renforcer une dévotion ancienne d’un pape originaire de Pologne où le sanctuaire marial de Czestochova a une place centrale. L’hypothèse psychanalytique, pour un homme qui a perdu sa mère très tôt, même si elle est difficile à explorer, n’est pas à exclure.

En tout cas, Jean Paul II a infléchi dans un sens très particulier la piété mariale dans tout le catholicisme alors que, au moment du concile, elle avait commencé à évoluer. Tandis que que Paul VI avait fait de Marie la « première » des disciples et un modèle à suivre pour tous les baptisés, hommes et femmes, en appelant à être conscient des contextes socio-culturels passés, le pape polonais l’érige de nouveau en modèle transhistorique de la féminité.

Dans un monde contemporain où les femmes accèdent de plus en plus à des responsabilités, l’accent mis sur Marie, conçue avant tout comme une « mère », conduit de nouveau à séparer le monde des hommes et celui des femmes. Le pape assigne les femmes à un rôle spécifique et justifie par là même leur rôle second dans la gouvernance de l’Église et les plus hautes fonctions liturgiques. L’exaltation de la figure de Marie est souvent un argument utilisé pour contrer la critique de la misogyne du catholicisme romain. Mais l’exaltation de cette figure sert aussi à cantonner les femmes dans des rôles spécifiques et surtout ne pas remettre en cause l’organisation interne de l’Église.

Quel bilan tirer aujourd’hui de cette mise en avant de la dévotion mariale ? La crise des abus n’a-t-elle pas révélé les soucis causés par la dissymétrie des structures de gouvernance ?

Pour en savoir plus sur Jean Paul II et découvrir des aspects moins connus d’un saint que certains ont souhaité voir canonisé en urgence au prix d’une série de difficultés dans l’Eglise catholique aujourd’hui :

Christine PEDOTTI et Anthony FAVIER, Jean Paul II, l’ombre du saint, Paris, Albin Michel, 330 pages.

Disponible en magasin : la Librairie, la Procure, la FNAC, Cultura, Amazon et dans toutes les bonnes librairies ! Et pour les « fans », le site Témoignage chrétien propose des exemplaires dédicacés.

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