« La canonisation de Jean Paul II marque la fin d’un long cycle dans l’histoire du catholicisme, celui du rêve de retour de la puissance, porté de bout en bout par le pontife polonais et qu’a tenté de poursuivre le cardinal Ratzinger élu à sa succession. Les signes de cette fin de cycle sont nombreux.
La démission de Benoît XVI, épuisé par la multiplication des scandales, tant sexuels que financiers, avait déjà été en elle-même un reniement de ce qu’aurait voulu Jean Paul II […] Non seulement son successeur dut régler l’affaire Maciel, mais il fut obligé de faire face aux immenses scandales d’abus tant du clergé et que des grandes institutions religieuses en Irlande, aux États-Unis, en Australie.Ce que Jean Paul II n’avait voulu ni voir ni savoir, il lui fallut l’assumer à la face du monde et égrener révélation après révélation le chapelet de la désolation et des demandes de pardon aux victimes.
La succession de Benoit XVI marqua une nouvelle rupture, plus profonde encore, avec le long pontificat de Jean Paul II. Le pape François reçoit de ses frères les cardinaux au moment de son élection la très lourde charge de tenter de sortir l’Église catholique de la crise profonde dans laquelle elle s’enfonce. Admettre la réalité et la gravité de cette crise, c’est bel et bien mettre en cause le bilan des vingt-sept années du règne de Jean Paul II.
On objectera que la sainteté d’un homme ne se mesure pas à la réussite de ses actes de gouvernement et que ce sont les vertus de l’homme, sa foi, sa charité, on espérance qui sont reconnues par sa canonisation. Il reste que cet homme-là fut d’abord pape, et que les ombres de son pontificat s’étendent sur sa personne d’autant plus qu’il a gouverné de façon personnelle et avec l’autorité et la centralité qui sont le propre de la papauté catholique. En tout état de cause, compte tenu de la gravité de la crise qui affecte le catholicisme au plan mondial, il est légitime d’exercer sur le pontificat wojtylien un droit d’inventaire. »
