27 octobre 1986 : une rencontre à Assise pour « ne pas prier ensemble » ?

Christ LIGHT (2017), mémorial de la journée mondiale de prière pour la paix à Assise, Wikimedia : Creative Commons.

C’est un épisode qui contribua à la réputation de sainteté de Jean Paul II de son vivant. Le 27 octobre 1986, sous l’oeil des caméras du monde entier, le pape parvint à réunir à Assise des dignitaires de nombreuses religions pour prier pour la paix. Ce jour-là, on dit que toutes les armes se turent. Joseph Ratzinger, le jaloux gardien de la « doctrine de la Foi », n’y était pourtant guère favorable. Les lefebvristes, qui se rapprochaient alors de plus en plus du schisme, s’agitèrent et fulminèrent. Jean Paul II y gagna assurément ses galons de « progressiste ». Mais qu’en est-il vraiment ?

À y regarder de plus près, le pontificat de Wojtyla a fait avancer de manière très prudente l’Église sur le plan du dialogue. Malgré les différentes langues et origines, c’était un clergé quasi-exclusivement masculin qui représentait l’humanité ce jour là. Notons aussi qu’à Assise seules les confessions religieuses étaient représentées. Les convictions philosophiques qui n’acceptent pas l’idée de Dieu ou en doutent ne furent pas invitées. Le dialogue, s’il était bel et bien envisagé, ne restait inter-religieux et ne se laissait pas encore déranger par l’inter-convictionnel. En tout cas, le « syncrétisme » et le « consensus » sont écartés par le Vatican comme d’affreux repoussoirs. Comme le cardinal Etchégaray le précisa à la presse : à Assise on ne pria pas ensemble mais on fut « ensemble pour prier ».  

Les années Jean Paul II sont celles où on bascule de l’idée de « mission », passablement écornée par le processus de décolonisation, à celle de « nouvelle évangélisation ». Cette dernière est à destination spécifique des vieilles terres de chrétienté européenne où la déprise est plus forte. Ce nouvel idéal, sans se départir totalement d’une nostalgie pour le passé où la papauté était toute puissante, ne fit pas place non plus à l’inculturation demandée par de nombreuses Églises locales.

Des théologiens, comme le Français Claude Geffré, mais bien d’autres, qui affirmèrent qu’on peut trouver du vrai dans d’autres traditions religieuses, en firent les frais en étant condamnés. Et comment oublier, après Assise, une déclaration comme Dominus Jesus en 2000 ? Cette dernière, qui  rappelle que seule l’Eglise catholique est dépositaire de l’entièreté de la Révélation, a passablement refroidi le monde protestant et le travail œcuménique….

Et que reste-t-il aujourd’hui de ces certitudes assenés à coups de discours, d’encycliques et de condamnations de théologiens ? « L’apostasie » du vieil Occident chrétien n’a nullement ralenti et les grandes religions ne sont guère considérées comme des facteurs de paix. L’esprit d’Assise promu par Jean Paul II, n’a que très brièvement maquillé une conception plus étroite et identitaire du catholicisme.  

Pour en savoir plus sur Jean Paul II et découvrir des aspects moins connus d’un saint que certains ont souhaité voir canonisé en urgence au prix d’une série de difficultés dans l’Eglise catholique aujourd’hui :

Christine PEDOTTI et Anthony FAVIER, Jean Paul II, l’ombre du saint, Paris, Albin Michel, 330 pages.

Disponible en magasin : la Librairie, la Procure, la FNAC, Cultura, Amazon et dans toutes les bonnes librairies ! Et pour les « fans », le site Témoignage chrétien propose des exemplaires dédicacés.

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